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Bienvenue chez moi avec des chats, des pensées du Jour et des tableaux de chats

Quand l'âne se raconte

Quand l'âne se raconte

 Au xxe siècle en France (1908), les patients du sanatorium de     Berk sont véhiculés par des ânes. (Photo Wikipedia)

 

Une très belle lettre  que je partage avec vous...

Vous pouvez la retrouver  chez Jean-Louis ici Nature ici ailleurs

 

L'âne n'a jamais été reconnu à sa juste valeur. Caricaturé comme un animal idiot, l'âne a failli disparaître de nos campagnes tant le mépris des Hommes à son égard est grand. Heureusement, des associations veillent au grain pour faire vivre les différentes races locales et changer la destinée de ce génial animal (Voir par exemple ICI). Quand l’âne se raconte à travers la plume d’Allain Bougrain-Dubourg…

« C’est ma semaine de gloire. Me voilà trônant au côté du bœuf dans la crèche qui invite à la paix. J’en accepte d’autant plus l’honneur que je le sais éphémère. Depuis 5 000 ans que nous cohabitons, je suis resté le bon à tout faire. Aucun prestige n’accompagne mon histoire, aucune fascination ne glorifie mon quotidien. Je suis une bête de somme, rien d’autre. Pire, on m’affuble d’une niaiserie injuste.

Rappelez-vous, votre philosophe Buridan se permit de me caricaturer en indiquant que je pouvais mourir de faim et de soif face à mon picotin d’avoine et mon seau d’eau, faute de savoir choisir entre l’un et l’autre. Buffon, votre grand naturaliste, n’est guère plus flatteur. Son analyse se résume ainsi : « À considérer cet animal, même avec des yeux attentifs, et dans un assez grand détail, il paraît n’être qu’un cheval dégénéré ». Merci pour le portrait! Et le bonnet d’âne qui punissait les cancres, encore un symbole avilissant. Il me faut cependant être juste en rappelant que dadmirables auteurs ont plaidé ma cause. Victor Hugo, évidemment, figure en tête de liste. L’âne Patience a traversé le temps, indomptable et moqueur, il incarne l’humble sagesse. Robert Louis Stevenson a reconnu mes mérites dans les sentiers cévenols. Et Francis James qui clame « j’aime l’âne » ou Jean de la Fontaine rappelant mon calvaire dans « Le cheval et l’âne ». Mais ces plaidoiries, si réconfortantes soient-elles, ne compensent pas la misère que mon clan a enduré.

Nous partagions déjà le sort peu enviable des fellahs (paysans égyptiens) et autres esclaves lorsque les pharaons régnaient sur la vallée du Nil. Au milieu du XIXe siècle, nous étions près de 400 000 en France, souvent compagnons d’infortune des « journaliers », ces modestes travailleurs prêts à assumer toutes les besognes. Nous étions « le cheval du pauvre » aussi malmenés que ce dernier. Combien d’entre nous ont succombé sous la charge et les coups ici et là-bas, en Afrique du nord?

Vos tracteurs et autres chemins de fer ont fort heureusement soulagé notre quotidien. Ils ont peu à peu effacé notre usage. La machine ne donne pas de coups de pieds, avez-vous pensé, en la préférant. Notre population s’est alors effondrée. Nous étions encore 110 000 en 1946 et seulement 19 000 en 1980. Ce nombre est remonté aujourd’hui grâce à l’action de certains d’entre vous qui ont voulu conserver nos races.

Merci au département de la Manche qui détient le plus gros cheptel. Reconnaissance aussi aux sept associations de races d’ânes qui nous préservent en Provence, dans le Berry, en Poitou ou en Normandie. Désormais, nous sommes souvent considérés comme des animaux d’agrément ou des compagnons de voyages touristiques. Les chemins de Compostelle en témoignent. Il est maintenant temps de nous réhabiliter définitivement. L’initiative de Job Le Borgne de la Tour, maire de Saint-Léger-des-Prés (Ille-et-Vilaine) pourrait vous inspirer. En 1991, il prenait un arrêté municipal disant dans son article premier : « Il est interdit d’utiliser sur la commune toute expression portant atteinte à l’honorabilité de l’âne. En particulier « bête comme un âne », « ânerie », « bonnet d’âne », etc. » Article 2 : « Tout contrevenant pris en flagrant délit devra présenter ses excuses, sous forme de carottes ou friandises aux ânes résidant sur la commune ».

Qu’on se le dise! »

Allain Bougrain-Dubourg

Quand l'âne se raconte

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E
Le principal est dit, j'adore les ânes de mon village. Je ne sais pas où ils sont actuellement. Ils rendent de grands services dans le monde entier. Il y a plusieurs races mais ils sont avant tout de bons compagnons.
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M
Les ânes à l'honneur, ça me plait ! L'âne des Pyrénées (APY) est en pleine renaissance, pas facile en ce moment pour les concours, mais mon fils disparu était un éleveur passionné, il a été primé pratiquement chaque année depuis qu'il avait monté son élevage. Il avait acheté sa première ânesse en 2000 et puis tous les ans, à partir de 2003 il a fait naître, et il avait développé un très joli troupeau. Bises Béa
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É
C'est vrai que les ânes mériteraient d'être plus mis en lumière. Bisous
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S
Merci Béa pour cette très belle lettre qui rend justice à nos amis les ânes.                          C'est vrai qu'on utilise leur nom de façon très négative. Pourquoi, je me le suis toujours demandé.  La langue française est très animalière: "froid de canards, poser un lapin etc.<br /> Petit sourire pour les excuses à faire aux ânes sous forme de carottes ou autres friandises.
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U
Bonsoir Béa,L'âne un animal si doux et intelligent. Je ne sais pas d'où lui vient cette réputation d'idiot. Jusqu'au bonnet d'âne aux écoliers qui travaillaient mal en classe. Un article formidable. Bonne année 2021, prends soin de toi, grosses bises Véronique
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C
Merci Béa pour cette autre belle et bonne lettre. L'âne, un animal que  j'♥ beaucoup ! <br /> Bon mois de janvier !<br /> Bises ♥
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S
J'ai toujours adoré les ânes, un animal affectueux, mon rêve serait d'avoir un immense parc pour avoir des ânes. En revanche, ils sont bruyants donc il faut vraiment avoir une très très grande demeure.  
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R
Ces pauvres petite bêtes utilisées a outrance et mal aimée trop souvent car un fort caractère sont pourtant très douces et fidèles...<br />  très bonne année 2021 a toi et tes proches. Gros bisous
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Z
Très belle lettre ! Et merci aux auteurs qui ont rendu justice à ces animaux! Dans le très bon film "Antoinette dans les Cévennes" les ânes ont aussi un beau rôle. .
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C
Merci pour cet article fort intéressant :-)
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